Peintre

Riv

Peintre, Performer, Street Artist, Directrice artistique, Illustratrice

Paris / Bruxelles

Riv - Les Autodidactes

Riv est un vrai couteau suisse, elle est artiste peintre, performer, directrice artistique et illustratrice autodidacte. Elle souhaitait devenir journaliste géopolitique, mais à la suite d’un performance artistique qu’elle effectue à l’occasion de la journée de lutte pour les droits des femmes. Tout bascule, elle arrête ses études d’économie et se consacre à plein temps à son activité artistique.
Elle nous raconte.

Salut Riv. Tu es peintre, performer, street artist. On te laisse te présenter ? Quel est ton parcours ?

Hello, je suis Riv et je suis peintre, performer, street-artist, je fais aussi de l’illustration et de la direction artistique en free-lance (en somme, je suis un peu un couteau suisse). J’ai toujours beaucoup dessiné et écrit depuis que je suis gamine. Je pense que la peinture est venue à moi juste après une période assez compliquée de mon adolescence, j’ai eu un besoin d’exprimer ce qui s’était passé, un peu comme un syndrome post-traumatique. Mais j’étais incapable de poser des mots. J’ai donc peint et depuis je ne me suis jamais arrêté. Au début je ne montrais mes croquis à personne. Par pudeur je crois. Avec le temps, j’ai finis par assumer les petits tableaux que faisais dans mon coin en parallèle de mes études d’économie. Mon travail est devenu moins introspectif et de plus en plus engagé politiquement. L’année dernière j’ai fait une performance artistique à l’occasion de la journée de lutte pour les droits des femmes (le 8 mars) qui a joui d’une visibilité et d’une ampleur aussi réjouissante que fortuite. Ça m’a servi de déclic, j’ai donc stoppé mes études, je me suis jetée tête la première dans cette aventure périlleuse et depuis tout s’est un peu enchainé. Aujourd’hui j’ai monté ma boîte, j’ai deux expos derrière moi, et un milliard de projets fous qui arrivent!

Quelle est, pour toi, la définition d’être autodidacte ?

Être autodidacte c’est être téméraire et acharné, c’est avoir pris la décision de se construire tout seul, c’est aussi une forme de liberté au final.

À quel niveau d’études t’es tu arrêtée ? Qu’est ce qui t’a poussé à être autodidacte dans ton milieu ? C’est un vrai choix au final ?

J’ai eu mon bac et je me suis arrêté à une licence d’économie que je n’ai jamais finie. Je ne considère pas avoir mis un terme à mes études, parce que je vais surement finir par les reprendre un jour ou l’autre, mais dans un autre domaine que celui des arts plastiques à proprement parler. C’est un des seul domaine où le feeling est plus important que le savoir. Je préfère être libre d’expérimenter par moi-même, à mon rythme, au risque de me casser la figure parfois (mais ça aussi fait partie du jeu).

Comment as tu fait (ou fais tu) pour apprendre seul ?

Pour ce qui est des connaissances techniques, je n’ai jamais pris de cours de dessin ou de peinture. Je crois que c’est une question de pratique, avec les années on finit par avoir le sens des proportions et on arrive à gérer les matières et les couleurs. Ensuite, pour les logiciels type photoshop ou illustrator, ce n’est pas si compliqué et il y a plein de tutoriels sur internet. Ce genre d’outils, plus on les utilise plus on arrive à les optimiser et à gagner en efficacité. Au début les interfaces peuvent paraître un peu indigeste mais on apprend rapidement à s’amuser avec. Au delà de cela, j’ai encore énormément de chose à apprendre et je suis en constante recherche pour améliorer ma technique.

Quels sont les aspects positifs et négatifs que tu as ou que tu rencontres quotidiennement dans ton parcours, en tant qu’autodidacte ?

L’aspect négatif principal d’être autodidacte (et ce combiné au fait que je suis très jeune) c’est le manque de crédibilité. J’ai besoin de faire deux fois plus mes preuves que les autres. Mais ça me boost plus que cela ne me freine.

Quels sont, selon toi, les aspects positifs et négatifs à ne pas faire de grandes écoles / des études poussées ?

Pour ce genre de métiers, le diplôme n’est pas foncièrement nécessaire, par contre il est valorisé. Sortir d’une haute école d’art aide à trouver des contrats et des financement, ça apporte une certaine légitimité, c’est certain. Après, c’est loin d’être obligatoire, d’ailleurs faire des études d’arts appliqués, c’est aussi prendre le risque de perdre une forme de spontanéité et de naïveté dans le processus créatif. Certaines institutions peuvent parfois avoir tendance à formater leurs élèves, or si il a un domaine où il ne faut surtout pas l’être, c’est bien celui-ci. Néanmoins, ce n’est pas le cas de toutes les écoles et quand bien même, je n’ai rien contre ces établissements, simplement leurs méthodes ne me correspondent pas.

En tant qu’autodidacte, est-ce que tu as (ou a eu) la sensation de te lancer dans la conception de quelque chose de vertigineux/ambitieux, justement, pour palier au manque de diplômes (et te démarquer) ?

Je suis super ambitieuse, j’ai toujours eu envie de me lancer dans des projets pharaoniques, mais c’est davantage pour me prouver des choses à moi-même, plutôt que pour palier au fait que je sois autodidacte. C’est certainement le témoignage d’un petit syndrome de l’imposteur (d’ailleurs très récurent chez les autodidactes).

Est-ce qu’il y a quelque chose que tu n’as pas pu faire à cause du manque de diplômes ou au contraire, pas du tout ?

Un diplôme aurait peut-être pu m’aider à trouver des financements plus facilement. Aujourd'hui, j’ai quelques grands projets en prévision dont je ne suis pas certaines qu’ils finissent par voir le jour. Ce sont des projets artistiques humanitaires, pas rentables pour la plupart, et je ne peux pas me permettre de m’auto-financer à chaque fois, sous peine de faire couler ma petite structure pro (big up à Marc mon expert comptable).

Enfant ou adolescente, étais tu déjà attirée par le métier que tu exerces maintenant ?

Je suis issue d’une famille d’artistes et j’ai toujours été passionnée d’art, mais je ne me voyais pas en faire mon métier. Étrangement mes amis me disent que c’était presque évident que j’allais choisir cette voie, bien qu’à la base je souhaitais faire du journalisme géopolitique et j’étais partie sur des études plutôt très longues. C’est venu à moi un peu par hasard, mais je suis super heureuse de vivre de ma passion, je reviendrais en arrière pour rien au monde.

Penses-tu que ce que tu as vécu dans ton enfance-adolescence t’a aidé à avoir ensuite un parcours atypique, sans diplôme, ou pas du tout ?

En effet, j’ai des mamans qui ont aussi des parcours dits « non-conventionnels », l’une est photo-journaliste et l’autre écrivaine (entre autres), donc forcément ça aide à se lancer. De surcroît, j’ai été autonome et indépendante vraiment super tôt, donc je suis débrouillarde et j’aime faire les choses par moi même. C’est surement pour ça que je me suis permise de m’affranchir du parcours scolaire classique et qu’aujourd’hui je suis en free-lance, donc ma propre patronne.

À l’école, est-ce que tu t’es sentie bien conseillée en terme d’orientation d’études ?

Houla, non... Vraiment pas du tout. Au contraire. Si j’avais écouté toutes les conseillères d’orientation, il est clair que je serais pleine de regrets.

Pour toi, comment sont vus les autodidactes en France ?

En France, il y a toujours une petite réticence avec les autodidactes et avec les « self-made men » de manière générale. C’est dommage seulement c’est aussi à nous de casser les à-priori et de légitimer notre place. Dans mon domaine, c’est davantage la renommée qui fait la crédibilité et non l’inverse, c’est d’autant plus complexe mais c’est aussi une chance à saisir.

Un mot de la fin ?

Au départ, je me suis choisi un nom d’artiste pour être libre d’être positionnée politiquement sans que cela n’ait un impact sur ma vie professionnelle future (alors espérée) de journaliste. C’est plutôt ironique, au vu de la tournure que prend maintenant mon parcours artistique: les projets qui verront le jours en 2020 (et dans les années à venir), sont des projets hybrides d’un nouveau genre entre journalisme, militantisme et art visuel. En définitive, le fait d’être autodidacte et donc complètement autonome dans ma manière d’aborder mon métier m’a permis de m’affranchir des pré-requis et de me sentir libre de donner vie à des idées comme celles-ci. Aujourd’hui je n’ai toujours pas la prétention de me dire « artiste » mais je suis fière de pouvoir dire : je gagne ma vie avec ce qui m’anime et ce n'est pas prêt de s’arrêter.