Réalisatrice

Romy Trajman

Réalisatrice, musicienne

Paris

Romy Trajman - Les Autodidactes

Romy, si jeune et déjà en place, avec ses projets ambitieux et ses espoirs que l’on sent à chaque mot. Passionnée, Romy est passée par L’école de la Cité, une école de cinéma crée par Luc Besson. Un concours qu’elle a réussi à l’âge de 19 ans. Ça force le respect quand on connait le nombre de tours qu’il faut passer pour être admis dans une grande école publique d’Art. Et pourtant, même diplômée, Romy s’est toujours sentie Autodidacte, et son parcours atypique et haut en couleurs le prouve. Pour éviter tout spoiler, nous n’en dirons pas plus ici. Elle nous raconte tout cela, si bien. Vent frais. Sang neuf.

Salut Romy, tu es réalisatrice. Tu as fait, entre autres, l’Ecole de la Cité, créée par Luc Besson. Pourrais-tu te présenter ? Quel est ton parcours ?

Je m’appelle Romy Trajman, j’ai 24 ans. Je crois que mon parcours « Autodidacte » a commencé à 14 ans. A 14 ans, j’ai chanté dans un clip « Moi j’te dis LOL » qui a buzzé (inopinément) et ça a marqué un cap. J’ai ensuite quitté les cours pour étudier par correspondance et passer mon bac L en candidate libre. En parallèle, on a monté une boîte de production avec ma mère - qui justement, changeait de cap professionnel - et on s’est lancées ensemble sans vraiment de bagages : On a écrit une série (« Les Lolies » ) qu’on a signée avec le groupe TelFrance puis on a lancé une marque (LOL). C’était assez inspirant et fulgurant. Ensuite, le pilote de la série a été sélectionné dans un festival. La programmatrice m’a poussé à candidater à l’Ecole de la Cité, j’ai passé le concours et j’ai été prise. J’avais 19 ans. C’était assez fou et rapide ! Ce qui est drôle, c’est que cette école est en fait, une école d’autodidactes et ses valeurs sont celles de l’action : « DO IT YOURSELF ». Je me sens tout à fait dans cette énergie. J’aime explorer et y aller.

Enfant ou adolescente, étais-tu déjà attirée par le métier que tu exerces maintenant ? Penses-tu que ce que tu as vécu dans ton enfance-adolescence t’a incitée à poursuivre des études, ou pas du tout ?

Oui, du fait de cette expérience assez jeune (chanter et jouer dans un clip) ça a été assez naturel. Ce qui est drôle, c’est que ma mère à ce moment prenait un virage professionnel et on s’est lancées ensemble dans cette aventure « autodidacte ». Je lui dois beaucoup car jamais, il n’a été question d’âge ensemble. On prenait les décisions de façon commune. J’avais 15 ans mais nous étions associées pareil. Du coup, j’ai grandi assez vite et en même temps, c’était libre. Je dirais que j’ai pris ce chemin, dans une bienveillance et une liberté. Ma mère est anticonformiste (et anti école évidemment ahah). Avec mon petit frère, on a évolué dans cette atmosphère. Désormais je sais que mes valeurs sont là : l’éclectisme et les chemins de traverse. Je crois beaucoup en l’urgence. Toujours repartir de zéro. Apprendre en faisant. Ça me stimule. Faire des études, ce n’était pas du tout une priorité. Maintenant, j’ai l’équivalent d’un bac + 5 avec le diplôme « Ecole de la Cité » mais je me considère clandestine d’un parcours atypique.

Quels sont, selon toi, les aspects positifs et négatifs à avoir fait une école de cinéma ?

C’est bien de connaître un peu comment ça fonctionne ; les masterclass, les cours, les tournages, ça te permet de plonger « dans le milieu ». Après, j’aime l’impulsion, ne pas trop savoir et y aller à l’intuition, c’est la beauté du geste. Je cultive aussi cette naïveté. Elle m’est importante.

Quelle a été l'importance de ton diplôme dans ton parcours ? Est-ce qu'il y a des choses que tu n'aurais pas pu faire sans ton diplôme ?

C’est vrai que j’ai eu des stages grâce à l’école : Europacorp par exemple. J’ai aussi rencontré ma marraine de cinéma ainsi : Audrey Diwan, qui est une personne clé, hyper bienveillante comme une grande sœur de cinéma (D’ailleurs, allez voir « Mais vous êtes fou !! » ☺ son 1er film, qui est sorti en salles le 24 avril !!)

On peut avoir fait une école, mais quand même se sentir autodidacte en apprenant sur le terrain en dehors de l’enseignement, Est-ce que ça a été ton cas ?

A 2000% oui. Tous les jobs, j’ai été les chercher. Je me suis toujours sentie étrangère, j’ai des origines diverses, je suis belge habitant Paris et je viens d’une famille monoparentale, le fait de se sentir « borderline » c’est peut être un plus. Autodidacte, c’est un statut à part. Une case incasable, un tourbillon en mouvement. Un jour, Christophe, le chanteur, m’a dit : « TRACE TA ROUTE ». Lui, il a démarré à 16 ans, aucune école, rien. C’est sublime son chemin. Il est à part. C’est un joyau. Un autodidacte pur, qui s’est toujours écouté.

Au final si c'était à refaire, est-ce que tu referais le même parcours scolaire ? Ou t’arrêterais-tu plus tôt dans tes études pour directement apprendre sur le terrain ?

Je referais pareil et me dirais : Cultive ta différence, suis ton rythme, c’est ton histoire, c’est ta vie, ECOUTE TOI et toi SEULE. Ta différence, c’est ta force.

Pour toi, comment sont vus les autodidactes aujourd'hui en France ?

Ça commence à arriver, comme aux Etats Unis. J’ai vécu quelques mois à Los Angeles et j’adore leur façon de se motiver sur le « DO IT », sur le travail, ce qui compte pour eux, c’est ta motivation au moment T, ce dont tu es capable. Ils te donnent ta chance. Je me suis retrouvée à 22 ans à interviewer des producteurs chinois à Hollywood en parlant un anglais approximatif, parce que la boss a cru en moi. En France, impensable. J’ai même interviewé le producteur de « MISSION IMPOSSIBLE » ahah, tu vois, rien n’est impossible. Donc voilà, je pense qu’il faut mettre la puissance 2 ici. Il est temps. Revoir nos A.B.C. éducationnels, fonctionner davantage dans l’impulse et la motivation, offrir aux jeunes la confiance et non la méfiance !

Rencontres tu souvent des réalisateurs/trices autodidactes qui ne sont pas passés par la case école ? Penses-tu qu’ils ont les mêmes chances que ceux qui n’ont pas fait d’école de cinéma ?

Oui, je travaille avec Anaïs Straumann-Levy sur notre 1er film, c’est une amie, on est co-réalisatrices et on a monté notre boite ensemble. Anaïs est libre et curieuse, très couteau suisse. Et elle bosse ! ☺

Est-ce que tu trouves qu'il y a suffisamment de représentations d’autodidactes dans les Institutions, les entreprises aujourd’hui ? Mais aussi dans les milieux artistiques ?

Non. En musique, oui ! Mais dans le ciné, dans les institutions, c’est encore très formel je trouve. Il faut vraiment casser les codes. Ouvrir les horizons. Oser. Agnès Varda est un modèle. Il faudrait s’en inspirer davantage, dans le regard porté vers la création.

Un mot de la fin ?

Oui ! Je développe un film documentaire sur le divorce de mes parents et un 1er EP musical (« Filles de divorcés »). Les deux projets sont liés et indépendants. Le film est co-produit par KWASSA en Belgique et PARALLELL. J’écris, co-réalise et en signe la musique, avec Alexandre de La Baume à la production. Tu peux suivre l’aventure sur instagram ici @ledivorcedemesmarrants. C’est un projet à deux volets : couteau suisse et intime. Hâte d’en dire plus... Merci beaucoup de m’avoir donné la parole !